Don du sang en France : état des lieux

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Si vous aimez les petites expériences, rendez-vous sur un moteur de recherche, tapez « don du sang » et cliquez dans l’onglet « Actualités ». Vous constaterez que ce sujet est traité chaque jour dans de nombreux articles aux quatre coins de France. Et pour cause. Le don du sang est un enjeu de santé publique, mais aussi un vecteur de lien social et de solidarité qui touche des milliers de personnes. Patients en attente d’une transfusion dans le cadre d’une opération, hémorragies, maladies chroniques, les cas pour lesquels le don du sang est une question vitale sont nombreux. Pourtant, si les appels à la mobilisation sont si récurrents c’est parce que l’implication des Français est considérée comme fragile.

Des besoins permanents et en augmentation

En 2023, 2 678 054 dons du sang ont eu lieu. Si au premier abord ce chiffre semble énorme, il est à mettre en perspective avec son évolution au fil des ans, et notamment depuis ces dernières années. En effet, alors que le total des dons tournait autour des 3 millions entre 2014 et 2017, c’est une baisse constante qui a lieu chaque année depuis cette date. Le record de dons de 2011, avec 3 190 226, semble être désormais complètement inatteignable.

Pour expliquer cette baisse, inutile de se tourner vers une éventuelle mauvaise image du don sang. Au contraire, d’après l’Établissement Français du Sang (EFS), chargé de la collecte et de la distribution des produits sanguins, 96% des Français se déclarent favorables au don de sang, mais 40% d’entre eux avouent n’avoir jamais donné.
Entre baisse du nombre de donneurs, idées reçues et difficultés d’organisation, la situation interpelle.

L’Établissement Français du Sang, tire régulièrement la sonnette d’alarme : il faudrait environ 10 000 dons quotidiens pour répondre complètement aux besoins des hôpitaux. Ce chiffre n’est pas figé et pourrait même augmenter dans les années à venir en raison du vieillissement de la population et des progrès médicaux qui nécessitent davantage de transfusions. Parmi les utilisations concrètes et les bénéficiaires de ces poches de sang on ne trouve pas uniquement des accidentés de la route, on trouve aussi des patients atteints de cancers, des personnes souffrant de maladies du sang comme la drépanocytose ou l’hémophilie, ou encore les femmes victimes d’hémorragies lors de l’accouchement. Les besoins en sang sont donc nombreux et variés, et ils touchent tout le monde.

Le sang, si précieux et si fragile

L’organisation autour du don sang est une chaîne complexe dont chaque maillon possède à la fois un rôle majeur mais aussi une responsabilité. Qu’il s’agisse des professionnels, des praticiens, des communicants ou bien sûr des donneurs, c’est toute une série de petites actions qui permettent de venir en aide aux personnes en attente d’une transfusion.
Une des difficultés principales est d’ailleurs liée à la nature du sang. Prélever et conserver du sang demande de faire très attention à tout un tas de critères et de répondre à des normes très précises qui doivent absolument être suivies. A titre d’exemple, les plaquettes ne peuvent être stockées que cinq jours, et les globules rouges, six semaines. Cela signifie qu’aucune réserve à long terme n’est possible.

Afin d’éviter des pénuries, il est crucial de parvenir à recevoir des dons régulièrement. Mais ces dernières années, plusieurs signaux montrent que la France peine à maintenir un niveau de stocks suffisant, notamment lors des périodes critiques comme l’été et les fêtes de fin d’année, où les collectes connaissent un ralentissement.

Qui peut donner son sang ?

Le nombre de donneurs réguliers en France est estimé autour de 1,6 million. Pourtant, une large partie de la population est en capacité de donner son sang. En effet, les critères pour pouvoir donner son sang sont les suivants :

  • Etre âgé entre 18 et 70 ans
  • Peser au moins 50 kg

Les critères sont donc simples et des dizaines de millions de Français sont dans la capacité théorique de donner leur sang. A noter que certaines contre-indications existent pour garantir la sécurité des donneurs et des receveurs, mais elles ne représentent qu’une minorité de cas.

Des donneurs trop peu nombreux

Depuis quelques années, le nombre de donneurs est en baisse et le taux de nouveaux donneurs marque également le pas, ce qui a tendance à fragiliser encore davantage le système. D’après les statistiques, les jeunes générations semblent moins enclines à donner leur sang que leurs aînés, et avec le recul, il est également possible de dire que la crise sanitaire liée au Covid-19 a accentué ce phénomène. De nombreux donneurs habituels ont pris du retard sur leurs contributions et n’ont pas repris le chemin des collectes.

Si l’on s’intéresse aux tranches d’âge, une part importante des donneurs réguliers est âgée de plus de 50 ans. Cela signifie que d’ici 20 ans au plus tard il faudra les avoir remplacés par de nouveaux donneurs. Cette situation pose un vrai défi de renouvellement des volontaires. Les professionnels ont identifié que sans un engagement plus fort des jeunes adultes, la France risque de faire face à une diminution progressive du nombre de donneurs disponibles, voire à une pénurie qui n’aurait plus rien de temporaire.

Les obstacles au don du sang

Si les dons du sang ne sont pas aussi nombreux qu’espérés, c’est dû à plusieurs raisons. Première raison et sans doute la plus répandue, la peur des aiguilles et des prises de sang constitue un frein psychologique pour une partie de la population. Beaucoup de personnes redoutent de faire un malaise, de ressentir une douleur ou des effets secondaires après le prélèvement. Pourtant, dans la grande majorité des cas, un don de sang se passe sans encombre et ne provoque que peu d’effets indésirables.

Parmi les autres arguments avancés, le manque de temps figure en bonne place. Dans les faits, un don de sang dure en moyenne 45 minutes, entre l’inscription, le prélèvement et la collation post-don. Pour certains, il est difficile de trouver ce laps de temps dans une journée déjà bien remplie. L’absence de compensation matérielle ou financière, contrairement à d’autres pays où des incitations sont mises en place, peut aussi jouer un rôle dans cette réticence.

D’autres freins sont d’ordre médical. Certains donneurs potentiels se voient exclus temporairement ou définitivement en raison de critères sanitaires stricts. Un voyage dans une zone où sévit le paludisme, une anémie passagère, une récente infection virale (maladie saisonnière) ou encore un nouveau tatouage peuvent empêcher le don pendant plusieurs mois. Bien que justifiées d’un point de vue de sécurité, ces restrictions contribuent à limiter le vivier de donneurs potentiels.

La sensibilisation, un enjeu majeur

Le don du sang est un enjeu crucial de santé publique, mais encore mal compris par une large partie de la population. Si la plupart des Français en ont évidemment entendu parler, beaucoup ignorent qu’environ 80 % des adultes pourraient donner. Les hommes peuvent donner jusqu’à six fois sur une période de 12 mois, contre quatre fois pour les femmes. Les campagnes de sensibilisation sont nombreuses, fréquentes, bien pensées, mais il arrive qu’elles peinent à toucher un public large, et les collectes organisées dans les écoles, entreprises ou lieux publics ne suffisent pas à recruter suffisamment de nouveaux donneurs. Certaines initiatives, comme l’envoi de SMS aux donneurs réguliers, montrent leur efficacité, mais elles ne compensent pas le manque d’information du grand public.

Mais pas de fatalité ! Pour remédier à cette situation, plusieurs pistes sont envisagées. Multiplier les collectes mobiles, notamment sur les lieux de travail ou dans les centres commerciaux, pourrait permettre d’aller au plus près des donneurs potentiels. La France pourrait aussi s’inspirer de pays comme la Suède, où les donneurs reçoivent un SMS lorsqu’une transfusion est réalisée grâce à leur sang, ou l’Australie, qui propose un suivi personnalisé aux donneurs de plasma. Une autre mesure consisterait à accorder une journée de congé pour chaque don, afin de renforcer l’engagement citoyen. Les crises majeures, comme les attentats de 2015 ou la pandémie, ont prouvé que les Français savaient se mobiliser en urgence.

L’enjeu est désormais de transformer cet élan en habitude, notamment en sensibilisant davantage les jeunes générations via les lycées et les réseaux sociaux. Un simple don peut sauver jusqu’à trois vies : un chiffre qui devrait suffire à convaincre les plus hésitants. Et si vous hésitez encore, vous pouvez vous inspirer de l’histoire de James Harrison, un Australien récemment disparu qui, grâce à sa grande générosité et la présence d’un anticorps rare dans son sang, a permis de sauver la vie de 2,4 millions de bébés.

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